Avis ciné : Skyfall, Un Bond en avant
Quatre ans. Oui, quatre ans d’attente. Quatre ans de doute quant à la capacité de re-relancer la franchise après un Quantum of Solace plus que discutable. En même temps ce dernier a souffert d’une production très mal maîtrisée : un lancement trop précipité, un réalisateur qui n’arrivait pas à s’imposer et la grève des scénaristes, qui a fait aussi beaucoup de mal à d’autres franchises. Daniel Craig s’est même retrouvé à écrire la suite du scénario et des dialogues. Et comme il le dit si bien lui même : “Je ne suis pas scénariste moi”…
Et pourtant la pré-production de Skyfall ne partait pas sur de bons rails. A la fin de l’année 2009, la MGM frôle la faillite, ce qui met sérieusement en danger le lancement du vingt troisième épisode de l’agent 007. Coup de bol, l’entreprise de distribution/production est “rachetée” par ses créanciers en 2010. Le prochain Bond verra bien le jour au cinéma. Et pas avec n’importe qui : Sam Mendes en réalisateur, Daniel Craig en rôle titre, Javier Bardem en méchant, et de vrais scénaristes à l’écriture. Daniel Craig confesse même lors d’une interview que Skyfall était un des meilleurs scripts qu’il avait lu… Bref tout ceci avait de quoi mettre l’eau à la bouche.
Le 29 octobre, 3 jours après la sortie officielle, me voila avec mon ticket réservé pour la séance de 20h. La salle est bondée. Comme celle de la séance de 19h et celle de 21h. Au box office ça commence déjà très bien. Mais quant est-il vraiment de Skyfall ?
L’action prend place dans la continuité des épisodes précédents (bon ce n’est pas aussi clair que Quantum of Solace). James Bond est envoyé en mission pour récupérer une liste cryptée contenant les identités des agents du MI6 infiltrés de part le monde. La mission tourne mal et la liste parvient à se faire voler… La menace commence à se faire de plus en plus sentir. Le MI6 est hacké puis attaqué à la bombe et doit être re-localisé dans le métro londonien. Les soupçons penchent vers une attaque en interne, sûrement un ancien de la maison qui connaît parfaitement ses rouages…
La première chose qui frappe quand on visionne Skyfall, c’est la réalisation. On sent que Sam Mendes est derrière la caméra. Les scènes d’actions sont beaucoup plus posées que dans les précédents opus. Ici, pas de montage ultra rapide à la Jason Bourne. Tous les plans sont très travaillés, il y a une vrai composition en terme de couleurs et d’angles de prises de vues. La séquence en haut du gratte-ciel à Shanghai en est le plus bel exemple, tout en jeux de lumières et de réflexions de miroirs.
Ce côté personnel apporte beaucoup à ce nouvel opus, lui conférant une vraie identité qui le fait tendre vers le film d’auteur.
Mais ça n’en reste pas moins un véritable James Bond ! Les références aux anciens épisodes sont certes cocasses et ironiques (toutes en clins d’oeil), mais la classe, la prestance, le flegme des situations et de Daniel Craig n’en rappellent pas moins l’ADN des plus grands Bond. On arrive donc à un véritable consensus qui fait mouche.
L’autre point fort de Skyfall réside évidemment dans l’interprétation des personnages. Daniel Craig est encore une fois à la hauteur, il respire la classe dans un personnage plus que travaillé, qui lui confère un côté humain très inspiré. Les autres personnages ne sont pas en reste. Que dire de Javier Bardem dans ce rôle d’ex-agent meurtri dans l’âme qui se laisse peu à peu ronger par la folie ? Il est juste excellent, et l’affrontement entre ces deux icônes se révèle d’une intensité psychologique rare (la séquence de leur première rencontre est formidable dans sa mise en scène). M est toujours fidèle à elle même, quant au nouveau Q, et bien pourquoi pas ?! Il ajoute un peu de fraîcheur qui n’est pas surexploitée. Mais attention il ne faut pas non plus qu’il devienne le sidekick de l’agent 007 à la manière de Simon Pegg dans Mission Impossible.
Je parlais tout à l’heure que de vrais scénaristes semblaient s’être ardemment loués à la tâche pour écrire le script de Skyfall… Et bien malheureusement c’est ici qu’il pèche un peu, en voulant le rendre trop humain, trop personnel, trop intimiste… Il manque cette ampleur du grand complot, cette menace mondiale, que l’on avait entraperçu dans les deux épisodes précédents, même si ici le grand méchant reste très mégalo. Et puis on entre tout simplement un peu trop dans la vie privée de Bond, et ça, ça me dérange un peu. J’aurais aimé que cela soit un peu plus subtil, mieux dosé… A cela s’ajoute de véritables invraisemblances dans le scénario qui reviennent à froid, et on se dit : “Ah ouais, c’est quand même dommage, car ça aurait pu frôler le chef d’oeuvre ! ”, “Tout ça, pour ça ??”, “Non mais oh, y’a plus simple !”.
Mais Bond reviendra, avec toutes les icônes bien en place et remises au goût du jour, comme il le faut. Ça ne peut qu’augurer le meilleur…